Je partage son opinion. Très bon texte.
Ces parents assassins
En cette période du procès fort médiatisé de Guy Turcotte, difficile de ne pas y songer. Chaque année, au Québec, il y aurait de 12 à 14 enfants tués par leurs parents. Un peu plus que la moyenne canadienne, sans qu’on en connaisse la raison.
Certains le font pour mettre fin aux souffrances d’un enfant malade. D’autres le font pour des motifs religieux. D’autres encore, ne voient pas le bout du tunnel et choisissent de « partir » avec leur famille. Parfois, certains perdraient les pédales carrément…
Parmi ceux qui n’accompagnent pas leurs enfants dans la mort, certains « assument », avouent leur geste. D’autres semblent selon moi, se poser en véritables victimes.
Je ne suis pas psychiatre. Je n’ai jamais non plus été à la place de ceux et celles qui commettent un filicide. Je ne prétends pas avoir la vérité infuse. Simplement, comme mère, comme citoyenne, je me questionne. Et le cas du docteur Turcotte m’interpelle beaucoup. En fait, les commentaires que j’entends et lis un peu partout sur le sujet m’interpellent, surtout…
J’entends et je lis que cet homme fait pitié. Intimidé dans sa jeunesse, manquant de confiance en lui, puis vivant une relation de couple en montagnes russes et trouvant difficile la conciliation travail-famille (!), il a vécu, comme bien des gens, une séparation qui lui a fait mal.
Combien parmi vous avez également vécu tout ceci?
Est-ce une raison pour tuer des enfants qui n’ont rien à voir avec vos malheurs?
Certains ont vécu encore plus d’épreuves. Abus sexuels, violence, détresse économique profonde, toxicomanie, familles dysfonctionnelles et j’en passe. Est-ce qu’ils assassinent pour autant des gens?
Je manque d’empathie peut-être, mais je suis profondément convaincue que, quoiqu’on ait pu vivre comme épreuves, il nous reste à tous le libre arbitre. D’accord, on peut tomber dans un gouffre inimaginable de détresse par moments. Mais est-ce nécessaire d’y entraîner ceux qu’on prétend aimer?
J’ai lu aussi, un peu partout sur le NET, des commentaires qui m’ont donné froid dans le dos. Du genre : « Son ex-femme aurait dû ne pas provoquer son désarroi ainsi. Elle aurait dû cacher qu’elle avait un nouvel amoureux ». Dites-moi, de qui fait-on le procès ici?
On parle aussi beaucoup du manque de ressources pour hommes en détresse. Peut-être qu’il y a un manque. Mais s’il y en avait plus, seraient-elles plus utilisées? Est-ce que ceux qui commettent un tel acte y auraient réellement fait appel? Guy Turcotte, médecin, n’était-il pas bien placé pour trouver des ressources du genre?
Pour moi, cet homme n’a pas perdu le contrôle. Il a pris le contrôle. On sait tous ce qui peut détruire une mère : lui enlever ses enfants à jamais. C’est ce que Turcotte a fait.
Il a beau dire qu’il voulait mourir et ne désirait pas que ses enfants présents trouvent son cadavre. S’il a pris le temps de penser à ça, il avait également le temps d’éloigner ses enfants de lui. Une personne me racontait récemment qu’une de ses connaissances, ne désirant pas non plus que ses enfants la retrouvent morte, avait bloqué la porte de sa chambre après y avoir laissé une note. « Ne pas laisser entrer les enfants ».
De plus, comme médecin, Turcotte devait bien connaître des méthodes plus efficaces pour s’enlever la vie que celle qu’il a employée. Sans compter ces mots lancés à sa conjointe « Moi je ne suis pas mort parce que j’étais trop fâché contre toi. Je ne voulais pas te laisser d’argent avec mon testament ». Parlez-moi d’un gars décidé à mourir et qui regrette d’avoir assassiné ses enfants!
L’avocat de la défense va tenter de convaincre le jury que son client n’était pas lui-même lorsqu’il est passé à l’acte. Qu’il était plongé dans une trop grande souffrance. Donc, qu’il y a eu passage à l’acte, mais pas l’intention. Et ce, deux fois plutôt qu’une… Si le jury adhère à cette théorie et que la peine de l’accusée est réduite, la porte sera grande ouverte ensuite. « Vous avez tué vos enfants? On comprend, vous aviez trop de peine. C’était un genre… d’accident dans le fond. Ou c’était de la faute de tous, sauf de vous. Votre mère, votre femme, votre oncle cochon, votre patron… La faute, de la société qui ne vous comprend pas. La faute de l’amour passionnel… c’est tellement romantique l’amour passionnel… »
Je trouve quand même bizarre qu’on puisse prendre en pitié un homme qui a fait le serment de sauver des vies et qui en vole deux alors qu'on condamne (avec raison) par exemple, un père qui commet un « crime d’honneur » et enlève lui aussi la vie à son enfant. Si on y pense, dans la mentalité du second, l’honneur de sa famille qui se voit bafouée, c’est aussi une terrible souffrance.
Au risque de me faire lapider, je persiste et signe. Quand un parent, suite à une séparation (tout comme dans le cas d’un « honneur bafoué »), donne la mort à son enfant, il ne perd pas le contrôle. Il le prend.
Je ne verserai pas de larmes sur les Guy Turcotte de la Terre. J’ai autant de mépris à son égard que j’en ai envers l’assassin de Jolène Riendeau.
Je pleure par contre pour les petits anges tués de leurs mains et pour leurs familles qui elles, doivent survivre en se demandant ce qu’elles auraient dû faire pour les protéger de leur propre père ou mère…
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