Publié le 20 mai 2011 à 08h30 | Mis à jour à 08h30
Point de vue
L'homicide dans la famille... Comment prévenir l'irréparable?
Guy Turcotte | Homicide | Famille
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Selon les deux chercheuses, la séparation conjugale est en toile de fond dans la majorité des homicides intrafamiliaux.
Le procès fortement médiatisé de Guy Turcotte, cardiologue, père de deux enfants auxquels il a enlevé la vie, nous interpelle tous. La pensée qu'un parent s'en prenne à ses enfants heurte notre imaginaire collectif. Toutefois, l'homicide d'enfants par leurs parents fait près de 15 victimes par année au Québec. Les femmes sont, dans plusieurs de ces cas, tuées lors de leur commission.
La recherche montre que dans la majorité des homicides, l'idée de commettre le meurtre est présente depuis un moment dans l'esprit de la personne. Cette donnée importante oriente notre réflexion vers les moyens concrets qu'il est possible de mettre en place pour venir en aide aux personnes avant qu'elles ne commettent ce geste destructeur.
La séparation conjugale est en toile de fond dans la majorité des homicides intrafamiliaux. Près de 80% des meurtres surviendront dans ce contexte. Ils seront commis dès que le conjoint réalise que la séparation est définitive. Il refuse la séparation; le démembrement du noyau familial ne concorde pas avec l'image traditionnelle de la famille telle qu'il l'imagine et, dans ce contexte, il en attribue l'entière responsabilité à la conjointe qui lui fait «perdre sa famille». Dans la situation où la séparation distance le père de ses enfants, perçus comme sa propriété, ils seront tués par mesure de représailles.
Comment expliquer qu'un homme qui semble être un bon parent et conjoint arrive à commettre un tel homicide? Souvent, des comportements harcelants accompagnés de propos de vengeance et de menaces de mort envers la femme et, dans certains cas les enfants, sont des violences conjugales gardées secrètes par le couple ou par l'entourage car on ne peut s'imaginer que l'homicide puisse vraiment arriver. Ces comportements sont exercés par plus de 50% des conjoints qui tuent leurs femmes et leurs enfants. Ils s'intensifient avec la séparation, ou naissent en lien avec elle. Lors de leur intensification, ils seront peu à peu accompagnés d'idées d'homicides avec ou sans idées suicidaires.
Dans d'autres situations, les propos des conjoints expriment une rage et une souffrance qui entraînent des idées suicidaires accompagnées d'idées d'homicides. Dans ce dernier cas, il est possible d'observer des signes de désespoir chez les conjoints. Ils broient du noir et se referment sur eux-mêmes. Ils se plaindront aussi d'un profond mal de vivre. C'est durant cette période qu'ils en viendront à jongler avec l'idée de se suicider et d'amener leur famille avec eux. Pouvons-nous excuser le geste d'homicide? La réponse est non. La vie des autres, même de nos enfants, ne nous appartient pas.
Il existe divers organismes venant en aide aux conjoints ayant des comportements violents ou vivant une détresse lors de la séparation. Il existe aussi des maisons d'hébergement où femmes et enfants peuvent être en sécurité lorsque leur intégrité est en danger. Il est donc possible en tant que proches d'aider en invitant hommes et femmes à consulter ces ressources afin qu'ils traversent cette crise par la reconstruction et non par la destruction.
Myriam Dubé, Ph.D, chercheure au Cri-Viff (Centre de recherche interdisciplinaire sur la violence familiale et la violence faite aux femmes)
Christine Drouin, professionnelle de recherche au CRI-VIFF
Toutes les deux sont conférencières au Colloque international sur la violence envers les femmes qui se tiendra à Montréal du 29 mai au 1er juin prochain.
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Je crois que c'est l'article dont nous parlais cette semaine Misstress.