Isabelle Gaston «outrée»
Turcotte vide leur compte conjoint à son insu
Première publication 8 juillet 2011 à 07h20
Par Éric Thibault | Journal de Montréal
Trois mois après avoir tué ses enfants, Guy Turcotte a retiré presque tout l'argent du compte conjoint qu'il détenait avec son ex-conjointe. Sans la prévenir.
Les 11 jurés qui ont conclu à la non-responsabilité criminelle de l'ex-cardiologue pour les meurtres de son fils Olivier et de sa fille Anne-Sophie, en raison de ses troubles mentaux, n'en ont cependant pas été informés.
La Couronne a vainement tenté de contre-interroger l'homme de 39 ans sur cet incident, au 20e jour du procès, le 18 mai.
Il a demandé à son père
Le 25 mai 2009, Isabelle Gaston s'est aperçue, en consultant ses relevés sur Accès-D, que quatre retraits totalisant 1800$ avaient été effectués, à son insu, dans le compte conjoint servant à payer l'hypothèque de la maison qu'elle a habitée avec Turcotte et les enfants, à Prévost.
Deux retraits de 500$, le 20 mai, un troisième au même montant, le lendemain, suivi d'un autre de 300$. Il ne restait que 102$.
L'urgentologue a mentionné aux enquêteurs de la SQ assignés à l'affaire Turcotte, dans une entrevue sur vidéo, qu'au lieu d'aller travailler à l'Hôtel-Dieu de Saint-Jérôme, elle a dû prendre rendez-vous à la caisse populaire pour faire annuler sa carte de débit et faire placer son compte sous surveillance, en plus d'alerter la police et l'avocate qui la représentait dans les procédures légales entourant la séparation.
Pas d'excuses
Le 4 juin suivant, elle a téléphoné au père de Guy Turcotte, après avoir appris que c'est ce dernier qui avait utilisé la carte de guichet de son fils pour effectuer ces transactions. Après un bref échange où le père lui a dit avoir exécuté la demande de son fils, alors détenu à l'Institut Pinel, elle se serait fait raccrocher au nez.
«Il ne s'est pas excusé», a-t-elle dit aux policiers. Les sommes retirées du compte y ont été remises, quelques jours plus tard.
Lors d'un débat hors jury, Me Claudia Carbonneau a plaidé que ce «comportement post-délictuel» de l'accusé accréditait la thèse associant les crimes reprochés à un acte de représailles envers Isabelle Gaston, pour avoir rompu avec lui. Et pour démontrer que la colère de Turcotte persistait durant les mois suivants.
Les mêmes arguments furent invoqués avant le début du procès, sans plus de succès, quant à l'admission en preuve des lettres au contenu troublant que Turcotte, concentré sur l'argent et la division de leurs avoirs, a adressées à la mère des victimes, plus de cinq mois après le drame.
«Contexte trop différent»
Le juge Marc David a estimé que l'incident du compte conjoint, trop tardif pour être pertinent, s'inscrivait en marge des procédures de divorce et de partage du patrimoine familial du couple brisé. Un «contexte trop différent» de celui qui prévalait au moment de la tragédie du 20 février 2009 pour être soumis au jury.
Le juge a toutefois permis qu'on demande à Turcotte pourquoi il avait fait enlever Isabelle Gaston de son assurance-vie de 900 000$ et pourquoi il avait demandé à ses parents de récupérer un forfait dans un spa qu'il lui avait offert comme cadeau de Noël, dans les 15 jours suivant le drame.
L'ex-cardiologue avait répondu qu'il préférait que «sa famille», envers vers laquelle il se sentait coupable, en bénéficie.
Les choses de Turcotte
«Le 7 mars (2009), les parents de Guy m'avisent qu'ils vont venir chercher des choses à Guy. Dans leur demande, ils exigent de récupérer le certificat de massage du spa finlandais à Rosemère, cadeau que j'ai reçu à Noël. Ils veulent aussi récupérer les billets de spectacle que nous avions achetés pour nos enfants. Je suis outrée.
«Ils ont profité de ma vulnérabilité pour venir vider ma maison de la majeure partie de son contenu. (...) À partir de ce moment, les échanges seront faits par avocats, les parents de Guy n'ayant aucun jugement face aux demandes de leur fils.»
Le compte conjoint vidé
«J'appelle l'enquêteur Patrice Abel. Il me dit qu'il se chargera de faire sortir la bande vidéo (du guichet) pour que j'identifie les fautifs. Il n'y a pas de guichets dans les chambres des patients à Pinel!»
«J'ai appelé le père à Guy le 4 juin au soir (...). Il ne s'est pas excusé, m'a signifié que Guy lui avait demandé deux fois de faire les prélèvements. Quand je lui ai dit qu'on ne doit pas exécuter quelque chose d'illégal même si c'est notre fils qui en fait la demande, il a raccroché la ligne.»
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