Une folle passion
Daniel Renaud et Marc Pigeon
03/09/2011 08h05
C’était une relation pas comme les autres. Amoureux, passionnés, l’ex-enseignante Tania Pontbriand et son jeune élève de 15 ans auraient entretenu une liaison secrète pour le moins inusitée. Le garçon, aujourd’hui âgé de 25 ans, en a fait le récit devant le tribunal, hier. En voici l’histoire.
Il avait 15 ans et elle en avait 30, le double, lorsqu’ils se sont rencontrés à l’école secondaire Rosemère.
Lui était étudiant en 10e année et elle était sa professeure d’éducation physique et de « leadership ».
Durant quatre ans, ils ont vécu une folle passion au cours de laquelle ils auraient eu au moins 300 relations sexuelles selon ce qu’a déclaré l’étudiant qui, ironiquement, célébrait hier son 25e anniversaire de naissance par un témoignage émouvant et précis, à Saint-Jérôme.
Bonne réputation
D’emblée, l’adolescent a expliqué en anglais que par ses fonctions d’enseignante d’éducation physique et de « leadership », Tania Pontbriand organisait des voyages de camping et de vélo avec les étudiants.
« Je ne la connaissais pas, mais elle avait la réputation d’être une enseignante cool », a raconté le jeune homme.
En début d’année, elle a demandé à ses élèves d’écrire un carnet personnel. Traversant des moments difficiles, le jeune homme y a écrit plusieurs confidences.
« Elle m’a dit qu’elle était impressionnée par mon honnêteté et m’a donné la note de 99 % », a expliqué le jeune adulte selon qui la relation entre lui et la femme a alors commencé à changer.
Après un séjour en camping d’hiver où les relations ont été « professionnelles », a qualifié le jeune homme, lui et Tania se sont alors impliqués dans la préparation d’une randonnée à vélo qui a eu lieu durant la première semaine de mai 2002, notamment dans la région d’Oka.
Moufette providentielle
Alors qu’ils discutaient elle et lui près du feu de camp vers 23 h à proximité d’autres étudiants, une moufette a traversé le site de camping.
Pendant que les autres étudiants se sont rués dans leur tente, Tania Pontbriand et son élève se sont barricadés dans la cabine d’un camion. Ils y sont restés jusqu’à l’apparition des premiers rayons du soleil.
« Nous nous sommes parlé de nos vies. Elle m’a dit qu’elle regrettait son mariage. J’ai parlé de ma famille, de mes amis, des choses que je n’avais jamais dites à personne », a-t-il décrit.
Ils ont ensuite convenu d’un autre séjour de camping le 25 mai. La mère de l’adolescent était réticente, mais a finalement accepté qu’il y aille après avoir parlé au téléphone avec Mme Pontbriand.
Les premiers contacts
Les deux étaient sous la tente lorsque les premiers contacts physiques ont eu lieu.
« Nous étions couchés et elle m’a touché. Elle m’a dit : «Embrasse-moi». À cette époque, j’étais inexpérimenté. Je lui ai demandé : «Comment?» Elle m’a dit : «Comme tu veux». Je l’ai embrassée et elle m’a demandé de lui enlever son soutien- gorge. Je ne savais pas comment et elle m’a aidé » a raconté le jeune homme, selon qui ils ont ensuite eu deux relations sexuelles complètes sans utiliser de condom.
« Elle m’a dit que si nous recommencions, nous devrons en utiliser, a-t-il ajouté.
« Je veux être ta plus grande fan jusqu’à la fin de ta vie », lui aurait-elle dit.
Il a raconté que le mercredi suivant, Tania Pontbriand a pris congé. Elle est venue le chercher à l’école et l’a amené chez elle à Mascouche, où ils ont de nouveau fait l’amour, profitant de l’absence du conjoint de l’enseignante.
Selon le jeune homme, elle lui aurait alors dit qu’elle l’aimait et « que c’était trop parfait, qu’un jour, ça devrait finir ».
Très actifs
Avec deux couples d’amis, l’adolescent et l’accusée auraient fait un voyage de camping aux États-Unis. Leurs parents croyaient que les filles couchaient dans une tente et les garçons dans une autre.
Dans les faits, les deux autres couples ont couché sous leurs tentes respectives, et Tania et son jeune protégé ont dormi ensemble, seuls dans leur tente, a-t-il raconté.
Durant l’année scolaire, ils se voyaient deux fois par semaine et durant l’été, cela pouvait aller jusqu’à cinq fois. Chaque fois, ils faisaient l’amour, a-t-il dit.
Les relations intimes auraient surtout eu lieu dans la maison de Mme Pontbriand à Mascouche (en l’absence de son conjoint), mais elles seraient également survenues dans le bureau de l’enseignante, dans le bois, dans la maison et la piscine du jeune homme, a-t-il précisé hier.
À une certaine époque, l’enseignante allait chercher le jeune homme pour le conduire à l’école chaque matin. En fin d’après-midi, elle le ramenait chez lui.
Ils sortaient dîner et faisaient l’amour dans l’auto garée dans le stationnement du restaurant. Ils se parlaient également au téléphone chaque jour.
Durant l’été 2002, elle l’a présenté à sa famille et ses proches comme « un ami ». L’adolescent a même soupé quelques fois à la même table que le conjoint de Tania Pontbriand, qui ignorait tout de leur idylle.
Le jeune homme a expliqué qu’il était amoureux de sa professeure
Pour écarter les soupçons que sa mère aurait pu avoir, il lui mentait, a-t-il dit.
En amour
Les deux tourtereaux ont aussi mis au point un alphabet codé, afin de s’écrire des mots tendres sans crainte d’être pris. Eux seuls comprenaient le code, dont il a donné le secret au tribunal, hier.
« Je finissais l’école, j’ouvrais mon casier, et il y avait une note », a-t-il raconté. Un jour l’enseignante lui a offert un jonc et un pendentif d’identification militaire (dog tag) sur laquelle apparaissaient les lettres BFF pour best friends forever (meilleurs amis pour toujours).
Pour son 16e anniversaire, le jeune homme a raconté que Tania Pontbriand lui a offert 16 cadeaux, notamment une montre, de l’équipement de camping et un ourson en peluche. Elle lui a aussi offert une carte dans laquelle son mari avait également signé.
Le Noël suivant, elle a offert une montre en titane à l’adolescent. Mais son mari a su qu’elle avait acheté une montre et elle l’a reprise, échangée au magasin, et offerte à son conjoint, a-t-il raconté.
Un jour, alors que l’adolescent a fait un voyage en Floride avec sa famille, Tania lui avait remis de l’argent afin qu’il lui achète des sous-vêtements à la boutique Victoria’s Secret.
Lorsque sa mère a appris qu’il achetait ces vêtements pour Tania, elle s’est fâchée, se demandant pourquoi elle ne lui en avait pas plutôt fait la demande à elle. L’adolescent dit n’avoir jamais parlé de sa relation avec Tania Pontbriand, afin de ne pas lui amener de problèmes.
Le début de la fin
Mais en février 2003, sa mère, qui trouvait qu’il était trop souvent avec son enseignante, s’est opposée à ce qu’il parte de nouveau dans un camp et lui a interdit de la voir et de lui parler.
Tania Pontbriand lui aurait alors acheté un téléphone cellulaire pour qu’ils puissent continuer à échanger en cachette.
Il faisait croire à sa mère qu’il sortait promener le chien, mais donnait rendezvous à l’enseignante.
Au printemps de sa dernière année de secondaire, le jeune homme a emménagé chez des amis, car les relations avec sa mère étaient devenues pénibles.
Les rencontres avec Tania Pontbriand étaient alors plus difficiles et son inscription en septembre dans une institution plus éloignée n’a pas facilité les choses.
La professeure se serait ensuite séparée de son mari et aurait commencé une relation avec un autre homme, selon le jeune homme. Ils ont alors cessé de se voir.
« J’étais en dépression. Je ne mangeais et ne dormais pas », a-t-il décrit. Le dernier contact qu’il a eu avec Tania Pontbriand, c’est une conversation téléphonique en janvier 2006.
La confession
N’en pouvant plus de garder son secret, pensant même au suicide, le jeune homme en a parlé à un psychologue de son établissement scolaire. Celui-ci lui a suggéré de s’ouvrir à sa famille et ses amis.
Lors d’une soirée de poker entre amis, il leur a avoué sa relation interdite. Puis, une nuit d’insomnie, alors qu’il se trouvait sur Internet, il s’est mis à discuter avec un ami, qui l’a convaincu d’aller déballer son sac à la police. Ce qu’il a fait sur-le-champ, en février 2007, amenant avec lui photos, courriels et autres éléments incriminants.
« Elle n’était plus ma meilleure amie et ma girl friend, et je gardais un secret et ruinais ma vie pour la protéger », a-t-il dit en substance.
Il a aussi tout raconté à sa mère, qui a immédiatement tout compris du comportement étrange et de l’état psychologique de son fils.
« Elle était sous le choc, a décrit le témoin, hier. Elle disait «Voilà pourquoi tu as quitté le cégep, que tu es si déprimé. Accepte mes excuses », a-t-il raconté.
Le procès
Tania Pontbriand, aujourd’hui âgée de 40 ans, est accusée d’agression sexuelle et d’avoir eu des contacts sexuels avec un étudiant mineur alors qu’elle était en position d’autorité entre 2002 et 2004.
Les accusations ont été déposées en 2008, mais pour toutes sortes de raison, ce n’est que mardi dernier que le procès s’est ouvert devant le juge François Beaudoin de la Cour du Québec.
À l’ouverture du procès mardi, son avocate a déposé une requête en arrêt des procédures, mais celle-ci a été rejetée hier.
Mercredi, Tania Pontbriand a témoigné des préjudices causés par ces délais. Elle a expliqué qu’elle est incapable de trouver du travail en raison de tout le battage médiatique et qu’elle ne peut plus enseigner parce qu’elle a perdu son permis.
« Enseigner, c’est ma vie », a-t-elle dit. Quant au jeune, il avait décrit en une phrase tout le mal qu’il avait subi, lors de l’enquête préliminaire, en 2009 :
« Quand je réalise tout ce que j’ai manqué à 15 ans, tous les mensonges racontés à ma mère, mes amis et tous ceux que j’aime, je suis tellement désolé ».
Son témoignage se poursuivra le 28 novembre.
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