La télé vue par Madame Louise
Les flics ont bien de la chance… la Couronne, moins!
Louise Cousineau / TV Hebdo - 2011-03-24 14:50:13
Mon enregistreur numérique personnel a fait disparaître les cassettes de mon salon, tout en me permettant de sauter les pauses commerciales à toute vitesse. J’ai réalisé cet hiver qu’il est en plus un baromètre de mes goûts et dégoûts.
Chaque matin, j’ouvre la liste de mes enregistrements de la veille. Il s’agit de partir ma journée en beauté. Donc, j’écoute d’abord à ce qui me plaît le plus.
Perdantes: les émissions qui sèchent longtemps dans ma liste. Que je vais finir par regarder à contrecœur. C’est le cas de
Penthouse 5-0, hélas. Estelle et Loulou étaient deux excellents personnages secondaires dans
Les hauts et les bas de Sophie Paquin, mais elles n’ont pas assez de substance dans cette bande dessinée qui m’indiffère. Les répliques sont parfois amusantes, mais les situations manquent de crédibilité.
Coup de cœur
Gagnante absolue: la série
19-2.
Je ne suis pas la seule à craquer: même les policiers aiment cette histoire sur leur univers. Mon seul reproche: on n’y voit pas de flics se défouler sur des citoyens. Mais on peut se rattraper dans les bulletins de nouvelles qui nous annoncent les bévues policières. Les deux dormeurs de l’autoroute qui ont collé une contravention à un automobiliste qui les a filmés n’ont pas aidé à remonter la cote de popularité des policiers.
Le souci du détail
Tous les épisodes de
19-2 sont très bons. Le plus fantastique a porté sur le premier du mois, à la pleine lune en plus, où un vent de folie souffle sur la population. À la fin de la journée, un plan très long nous montre Nick Berrof et Benoît Chartier exténués, affalés sur le mur d’un lave-auto.
Leur voiture est couverte des débris d’un gros gâteau lancé par une vieille mégère sur le party après une fête qui a dégénéré. Il fallait voir son paumé de fils s’inquiéter du fait que sa mère était tombée en lançant le gâteau!
La beauté de cette série, c’est le souci du détail. Dans le vent de folie, Berrof se retrouve seul avec son fils qui vient de se casser un bras. Nick offre de passer l’après-midi à La Ronde avec lui. Le petit est surpris. «Un premier du mois?» Pour la première fois, on voit le père esquisser un sourire de contentement envers son fils. Le courant a passé entre eux.
Une rareté
Chaque semaine nous amène un nouvel éclairage sur les démons du passé qui hantent les deux héros: Ben, qui a arrêté son père ivrogne et qui est rejeté par sa famille et les habitants de son village, et Nick, dont le partenaire a été grièvement blessé au cours d’une opération mal planifiée. Un grand mystère plane sur l’événement, qui n’en finit plus de culpabiliser Nick.
On en apprend un peu plus à chaque épisode sur les personnages. Brouillard, le sexiste, bat sa femme, qui endure. Nick et Ben la sauveront de justesse, mais ne dénonceront pas leur abominable collègue, qui n’est pas vaillant au travail non plus. L’omertà.
Une production de cette qualité est une rareté. Voilà qu’on n’est pas sûr d’une suite la saison prochaine. Radio-Canada exige que la maison Zingaro, qui n’a pas l’habitude de la fiction, engage une productrice aussi bonne que Sophie Deschênes, qui ne pourra pas faire la suite, étant déjà occupée ailleurs.
Souhaitons que cela s’arrange. On ne laisse pas tomber un chef-d’œuvre.
Toute la vérité sur la Couronne
Si les policiers sont sûrs de profiter du capital de sympathie engendré par
19-2, les procureurs de la Couronne sont moins avantagés par la série
Toute la vérité. Le jeune Sylvain est un modèle à ne pas suivre.
On l’a connu sous un très mauvais jour: charmant, séduisant, mais par ailleurs menteur, dissimulateur et paresseux. Rien à voir avec la conscience professionnelle de Me Sonia Lebel, qui a été convaincante et émouvante à
Tout le monde en parle. Une passionnée dans un système qui paie mieux les avocats des motards que les procureurs de la Couronne.
Le Québec est ainsi fait.
Sylvain a été réintégré à la couronne grâce à son papa juge, qui l’a pistonné. On s’attendait au pire, puisque aucun téléspectateur ne croyait à sa réhabilitation après sa consommation de drogue et d’alcool.
Regard sur notre société
Mais voilà que, au lendemain de
TLMEP avec Me Sonia Lebel, Sylvain nous a étonnés. Coïncidence étrange.
Deux vieilles dames respectées dans leur milieu sont accusées d’avoir fabriqué de l’ecstasy dans leur sous-sol. La défense plaide qu’elles n’ont pas d’antécédents et qu’elles devraient être libérées d’ici à leur procès.
Mais voilà que notre Sylvain est un homme transformé. Il a fait ses recherches et souligne que la drogue est destinée à être vendue aux abords des cours d’école.
Un effet direct de sa vie privée: sa blonde vient de mourir d’une overdose. Il connaît véritablement maintenant les terribles effets de la drogue. Bref, il fait honneur à sa profession.
Sylvain est-il guéri de ses défauts?
Toute la vérité est de loin la meilleure série de TVA. Il n’y est pas seulement question de drames personnels. C’est un regard sur notre société.