Publié : sam. juil. 31, 2004 5:28 am
Connaissez vous Caroline Brunet !?
Cette kayakiste de ma région: Québec !
Toute une femme de caractère....Elle s'entraine depuis tant d'année!
Souvenez vous a Sydney,tous s'attendait a la médaille d'or! Finalement,une histoire de vent je crois lui a enlever!!!
Voici un texte que j'ai trouver sur le site de Radio-Canada quelle a écrit le 26 Juillet 2004! Juste avant de partir pour Athènes....C'est vraiment très bon!! Ca m'a fait vibrer ce matin!
CAROLINE BRUNET: L'ATTENTE !!!
26 juillet 2004 - Le réveil de la veille est toujours bizarre, pas dans le sens de cocasse, de jamais vu. Bizarre plutôt parce que justement, après tant d'années, c'est toujours du pareil au même.
J'aurais pensé qu'avec les années... Non, toujours ce même sentiment qui circule dans mes veines, comme une petite autoroute aux heures de trafic. Trop de voitures et pas assez d'espace. Trop de sensations et juste moi.
Chaque fois je me dis que ça n'a pas de sens de vivre ça, cette attente, comme si le bouchon sur la petite autoroute me semblait interminable. Allongée sur mon lit, mon coeur peut battre si vite que je ne peux relaxer et apprécier mon dernier matin. Mon dernier matin ? Car le prochain sera le premier.
Je déjeune et me dirige vers le bassin le plus rapidement possible. Dès que je vois l'eau, quelque chose d'encore bizarre se produit. Cette fois-ci, c'est du déjà vu. L'eau m'attend. Le constat est tel que mon âme se retrouve. Le battement de mon coeur se met à ralentir, mes veines à respirer.
L'entraînement sur l'eau, le dernier des derniers, est toujours si moche. Je dois me convaincre, chaque fois, que c'est ma tête qui communique avec mon corps, lui disant de ne rien donner et tout garder, pour demain...
Plus tard dans la journée, le trafic sur la petite autoroute bouchonne à nouveau. Les sensations qui m'habitent m'empêchent de vivre le moment présent. J'entends des sons, je vois des gens, je lis des mots, mais rien de concret, rien que je veuille vraiment vivre. Je leur mens en faisant comme si je les écoutais. Je me mens en faisant comme si je leur souriais vraiment. Ils me mentent comme s'ils ne s'apercevaient de rien.
Les heures passent. J'attends. Viennent les repas. Moi d'habitude si gourmande, l'appétit n'existe plus. Le goût de la nourriture se transforme en ce qui circule en dedans. Un mélange de gaz, de vapeurs, de toxines, laissés trop longtemps, en attente, comme de vieux oeufs pourris.
C'est dégueulasse comme odeur, comme goût et comme texture. Et plus tard, beaucoup plus tard, l'attente du sommeil qui n'arrive jamais. Les trucs : les comptes à rebours de 100 à 0 dans ma tête. Je n'arrive jamais à compter d'un coup. Je dois toujours recommencer.
Il y a la lecture, mais c'est souvent comme mes décomptes. Je dois relire le même paragraphe plusieurs fois avant de me souvenir de l'histoire. Enfin, il y a la nuit, le noir, l'attente. L'ouverture de mes yeux me confirme que j'ai réussi ! J'ai dormi, un soulagement m'éprend.
Au même moment, la réalisation qu'il n'y a plus de demain. C'est aujourd'hui. C'est le premier matin. Plus tard, le son de l'alarme résonne en moi à l'allure d'un coup de fusil, comme s'il venait d'être tiré, c'est son écho qui me fera, qui nous fera toutes les neuf, quitter les blocs de départs.
Enfiler mes vêtements, faire ma toilette, cette routine quotidienne qui n'a aucune signification, devient ce jour-là, ce premier matin, si intense que j'ai l'impression de me voir de haut, ou sur film, au ralenti. Chacun de mes mouvements si précis, parfait. C'est peut-être cela qu'un condamné à mort ressent dans les heures avant son exécution. La réalisation qu'il est en vie et que son heure de grâce est tout près. Un sentiment de légèreté apaise celui de l'angoisse trop longtemps laissée en attente. L'attente sera bientôt terminée.
Le bruit des portes des chambres de l'hôtel, des ascenseurs, des « good morning », retentissent en moi comme un dernier salut. Le déjeuner ; des oeufs pourris. Une fois que mes yeux ont presque revu le contenu de mon estomac, je pars le plus rapidement possible vers le bassin.
J'ai besoin de voir l'eau, je sais qu'elle m'attend. Le nombre de voitures sur ma petite autoroute se disperse et la respiration dans mes veines circule à nouveau. Pas pour longtemps. Une tranquillité réconfortante anime mon échauffement, peut-être comme le condamné à mort en buvant sa dernière gorgée de café.
Mon angoisse, ce stress qui coupe mon souffle et fait vibrer mon coeur à la vitesse d'un coeur d'enfant, ne m'a pas désertée. Elle est toujours là. Mais je l'ai apprivoisée et je sais qu'elle a presque terminé de me faire attendre.
Les derniers regards échangés avec mon monde, avant de quitter pour de bon vers mon moment de grâce, n'en sont pas de véritables. Mes yeux ne voient plus très clair. De tous mes sens, c'est celui de l'odorat qui se manifeste le plus, tant en fait que les autres ne recueillent rien comme information.
Ma respiration est telle qu'elle se fait ressentir jusque dans les extrémités de mon corps. L'air que je respire n'a plus d'odeur. Puis, il y a le silence. Je n'éprouve plus rien. Je ne ressens plus rien. Je n'entends plus rien sauf le coup de fusil jadis tiré résonnant dans mon âme. Mon moment de grâce est à l'horizon...
Cette kayakiste de ma région: Québec !
Toute une femme de caractère....Elle s'entraine depuis tant d'année!
Souvenez vous a Sydney,tous s'attendait a la médaille d'or! Finalement,une histoire de vent je crois lui a enlever!!!
Voici un texte que j'ai trouver sur le site de Radio-Canada quelle a écrit le 26 Juillet 2004! Juste avant de partir pour Athènes....C'est vraiment très bon!! Ca m'a fait vibrer ce matin!
CAROLINE BRUNET: L'ATTENTE !!!
26 juillet 2004 - Le réveil de la veille est toujours bizarre, pas dans le sens de cocasse, de jamais vu. Bizarre plutôt parce que justement, après tant d'années, c'est toujours du pareil au même.
J'aurais pensé qu'avec les années... Non, toujours ce même sentiment qui circule dans mes veines, comme une petite autoroute aux heures de trafic. Trop de voitures et pas assez d'espace. Trop de sensations et juste moi.
Chaque fois je me dis que ça n'a pas de sens de vivre ça, cette attente, comme si le bouchon sur la petite autoroute me semblait interminable. Allongée sur mon lit, mon coeur peut battre si vite que je ne peux relaxer et apprécier mon dernier matin. Mon dernier matin ? Car le prochain sera le premier.
Je déjeune et me dirige vers le bassin le plus rapidement possible. Dès que je vois l'eau, quelque chose d'encore bizarre se produit. Cette fois-ci, c'est du déjà vu. L'eau m'attend. Le constat est tel que mon âme se retrouve. Le battement de mon coeur se met à ralentir, mes veines à respirer.
L'entraînement sur l'eau, le dernier des derniers, est toujours si moche. Je dois me convaincre, chaque fois, que c'est ma tête qui communique avec mon corps, lui disant de ne rien donner et tout garder, pour demain...
Plus tard dans la journée, le trafic sur la petite autoroute bouchonne à nouveau. Les sensations qui m'habitent m'empêchent de vivre le moment présent. J'entends des sons, je vois des gens, je lis des mots, mais rien de concret, rien que je veuille vraiment vivre. Je leur mens en faisant comme si je les écoutais. Je me mens en faisant comme si je leur souriais vraiment. Ils me mentent comme s'ils ne s'apercevaient de rien.
Les heures passent. J'attends. Viennent les repas. Moi d'habitude si gourmande, l'appétit n'existe plus. Le goût de la nourriture se transforme en ce qui circule en dedans. Un mélange de gaz, de vapeurs, de toxines, laissés trop longtemps, en attente, comme de vieux oeufs pourris.
C'est dégueulasse comme odeur, comme goût et comme texture. Et plus tard, beaucoup plus tard, l'attente du sommeil qui n'arrive jamais. Les trucs : les comptes à rebours de 100 à 0 dans ma tête. Je n'arrive jamais à compter d'un coup. Je dois toujours recommencer.
Il y a la lecture, mais c'est souvent comme mes décomptes. Je dois relire le même paragraphe plusieurs fois avant de me souvenir de l'histoire. Enfin, il y a la nuit, le noir, l'attente. L'ouverture de mes yeux me confirme que j'ai réussi ! J'ai dormi, un soulagement m'éprend.
Au même moment, la réalisation qu'il n'y a plus de demain. C'est aujourd'hui. C'est le premier matin. Plus tard, le son de l'alarme résonne en moi à l'allure d'un coup de fusil, comme s'il venait d'être tiré, c'est son écho qui me fera, qui nous fera toutes les neuf, quitter les blocs de départs.
Enfiler mes vêtements, faire ma toilette, cette routine quotidienne qui n'a aucune signification, devient ce jour-là, ce premier matin, si intense que j'ai l'impression de me voir de haut, ou sur film, au ralenti. Chacun de mes mouvements si précis, parfait. C'est peut-être cela qu'un condamné à mort ressent dans les heures avant son exécution. La réalisation qu'il est en vie et que son heure de grâce est tout près. Un sentiment de légèreté apaise celui de l'angoisse trop longtemps laissée en attente. L'attente sera bientôt terminée.
Le bruit des portes des chambres de l'hôtel, des ascenseurs, des « good morning », retentissent en moi comme un dernier salut. Le déjeuner ; des oeufs pourris. Une fois que mes yeux ont presque revu le contenu de mon estomac, je pars le plus rapidement possible vers le bassin.
J'ai besoin de voir l'eau, je sais qu'elle m'attend. Le nombre de voitures sur ma petite autoroute se disperse et la respiration dans mes veines circule à nouveau. Pas pour longtemps. Une tranquillité réconfortante anime mon échauffement, peut-être comme le condamné à mort en buvant sa dernière gorgée de café.
Mon angoisse, ce stress qui coupe mon souffle et fait vibrer mon coeur à la vitesse d'un coeur d'enfant, ne m'a pas désertée. Elle est toujours là. Mais je l'ai apprivoisée et je sais qu'elle a presque terminé de me faire attendre.
Les derniers regards échangés avec mon monde, avant de quitter pour de bon vers mon moment de grâce, n'en sont pas de véritables. Mes yeux ne voient plus très clair. De tous mes sens, c'est celui de l'odorat qui se manifeste le plus, tant en fait que les autres ne recueillent rien comme information.
Ma respiration est telle qu'elle se fait ressentir jusque dans les extrémités de mon corps. L'air que je respire n'a plus d'odeur. Puis, il y a le silence. Je n'éprouve plus rien. Je ne ressens plus rien. Je n'entends plus rien sauf le coup de fusil jadis tiré résonnant dans mon âme. Mon moment de grâce est à l'horizon...