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LE DOMAINE BLEU • Einstein, un extraterreste?
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Publié : mar. oct. 25, 2005 3:32 am
par Blanche Neige


Albert Einstein était épuisé. Pour la troisième nuit d’affilée, les pleurs de Hans, son petit dernier, avaient tenu la maisonnée en éveil jusqu’à l’aube. Lorsque Albert fut enfin sur le point de trouver le sommeil, il était tout juste temps de se lever pour ne pas être en retard au travail... Il ne pouvait se permettre de manquer un seul jour. Ce travail était la seule source de revenus de la jeune famille.
Marchant d’un pas alerte vers le bureau des brevets où il travaillait en tant qu’ « expert technique de troisième classe », Albert s’inquiétait pour sa maman. Elle ne rajeunissait pas, sa santé n’était pas florissante, et elle n’avait jamais approuvé le mariage d’Albert avec Mileva. Leurs relations étaient tendue. Passant devant une boutique, Albert jeta un coup d’oeil à son reflet dans la vitrine. Sa chevelure était en bataille, il avait encore oublié d’y passer un coup de peigne.
Le boulot. La famille. Joindre les deux bouts. Comme beaucoup de jeunes pères de famille, Albert ressentait pleinement le poids des responsabilités sur ses épaules.
Alors pour se détendre, il entreprit de révolutionner la physique.
En 1905, alors qu’il n’était âgé que de 26 ans et quatre ans avant qu’il ne décroche son premier poste de professeur de physique, Einstein publia 5 articles parmi les plus importants de l’histoire des sciences. Et tout cela rédigé pendant ses loisirs. Il parvint à prouver que les atomes et les molécules existaient bien. Avant 1905, les scientifiques n’en étaient pas persuadés. Albert Einstein avança l’idée selon laquelle la lumière était en fait constituée de petits paquets de particules (que l’on appellerait plus tard des « photons ») et posa par là-même les fondations de la mécanique quantique. Puis il décrivit les principes de sa théorie dite de la relativité restreinte : le temps et l’espace sont les fils constituant une même étoffe, laquelle pouvait être courbée, étirée et tordue.
Oh, et tant qu’il y était, il démontra que E=mc2.
Avant Einstein, le dernier scientifique a avoir connu une période de si féconde créativité fut Sir Isaac Newton. Ce fut en en 1666, alors qu’une épidémie de peste sévissait à Cambridge, et que Newton jugea plus sûr d’aller se mettre au vert dans la ferme familiale. Une fois tranquillement installé à la campagne, et n’ayant rien de mieux à faire, il développa la première théorie complète de la gravitation.
Pendant des siècles, les historiens qualifièrent 1666 d’annus mirabilis de Newton. Mais de nos jours, lorsque l’on évoque l’année miraculeuse, on pense plutôt à 1905 et à Albert Einstein. Si bien que l’Organisation des Nations-Unies a décrété 2005 « Année mondiale de la Physique », pour célébrer comme il se doit le centenaire des découvertes de 1905.
L’image que nous nous faisons aujourd’hui d’Albert Einstein est grossièrement celle d’un calculateur prodige à la chevelure rebelle. On nous a appris que ses idées étaient remarquablement en avance par rapport à celles de ses confrères. Un tel prodige ne peut sans doute s’expliquer que par le fait qu’il venait d’une autre planète, qui pouvait d’ailleurs bien être la même que celle dont vint également Newton en son temps...
« Oh non, Einstein n’était pas un extraterrestre ! » s’amuse le physicien et historien des sciences Peter Galison, d’Harvard. « C’était simplement un homme de son temps ». Chacun de ses extraordinaires articles de 1905 résolut un problème sur lequel les scientifiques de l’époque travaillaient d’arrache-pied, avec des succès divers. Pour Galison, « si Einstein n’avait pas existé, quelqu’un d’autre aurait tôt ou tard fini par faire les mêmes découvertes, d’une façon ou d’une autre ».
Ce qui reste particulièrement frappant dans le cas de 1905, c’est non seulement qu’une seule et même personne soit parvenue à écrire les cinq articles, mais aussi la manière dont il est parvenu à ces conclusions parfaitement justes.
Prenons simplement l’exemple de l’effet photoélectrique. Au début du XXe siècle, on se bornait à constater l’effet sans parvenir à l’expliquer : quand la lumière frappe un métal, le zinc par exemple, elle arrache des électrons aux atomes superficiels. Et cet effet ne peut s’expliquer que si la lumière arrive par paquets suffisamment concentrés pour arracher un électron à son orbite. Une simple onde ne pourrait en aucun cas créer le même effet photoélectrique.
Aujourd’hui, la solution parait évidente : la lumière est aussi une particule. Einstein fut le premier à faire cette proposition en 1905, et ce fut grâce à elle qu’il obtint le prix Nobel de physique en 1921. D’autres physiciens comme Max Planck, qui lui travaillait sur un problème lié, le rayonnement du corps noir, plus âgé et plus expérimenté, tournait autour de la solution depuis des années, mais se fit coiffer au poteau par Einstein. Pourquoi donc ?
C’était en fait une question d’autorité.
« À l’époque d’Einstein, si vous vouliez avancer l’idée que la lumière était constituée de particules, vous vous trouviez en contradiction avec les théories du physicien James Clerk Maxwell. Et personne n’avait envie de se retrouver dans cette fâcheuse posture. » rappelle Galison.
Il faut avoir présent à l’esprit le fait que les équations de Maxwell s’étaient avérées prodigieusement fécondes. Elles avaient permis d’unifier les théories de l’électricité, du magnétisme et de l’optique. Maxwell était parvenu à démontrer de façon indiscutable que la lumière était une onde électromagnétique. Maxwell était ce que l’on appelle une « figure d’autorité ».
Il se trouve qu’Einstein s’était toujours moqué comme d’une guigne de l’autorité. Non seulement il ne supportait pas qu’on lui dise ce qu’il devait faire ou ne pas faire, mais il était encore plus excédé lorsqu’on prétendait lui enseigner ce qui était vrai et ce qui ne l’était pas. Dès l’enfance, il avait pris l’habitude de mettre en doute ce que lui disaient ses professeurs. « Votre simple présence en ces lieux suffit à saper mon autorité sur la classe » lui lança un jour son professeur, le docteur Joseph Degenhart. Ce dernier lui prédit également « qu’il n’arriverait jamais à rien dans la vie ». Ces défauts de caractère allaient s’avérer cruciaux dans la réussite des recherches d’Einstein.
« En 1905 » rappelle Galison, « Einstein venait tout juste de recevoir son doctorat. Il n’était aucunement redevable à un directeur de thèse ni à aucune autre figure d’autorité ». Son esprit était tout aussi libre.
Avec le recul du temps, on sait aujourd’hui que Maxwell avait raison. La lumière est bien une onde. Mais Einstein aussi avait raison. La lumière est également une particule. C’est ce que l’on appelle la dualité corpusculo-ondulatoire de la lumière. Cette étrange dualité intrigue toujours aujourd’hui les étudiants comme elle intrigua Einstein en 1905. Comment peut-elle être les deux à la fois ? Einstein n’en avait à vrai dire aucune idée. Mais ça ne l’arrêta pas en si bon chemin. Négligeant la prudence scientifique la plus élémentaire, Einstein adopta l’intuition comme guide privilégié de ses recherches. « Je crois au pouvoir de l’intuition et de l’inspiration » écrit-il en 1931. « À un certain moment, je sais que je suis dans le vrai mais sans nécessairement pouvoir expliquer pourquoi. »
Bien que les cinq principaux articles d’Einstein aient été écrits en l’intervalle d’une seule année, il n’avait jamais cessé de se passionner pour la physique depuis sa plus tendre enfance. « Chez les Einstein, lors des repas familiaux, la science était couramment un sujet de conversation » explique Galison. Le père d’Albert, Hermann, et son oncle Jacob dirigeaient une société allemande qui fabriquait des articles aussi divers que des dynamos, des lampes à arc, des ampoules et des téléphones. Au début du XXe siècle, c’était de la très haute technologie, « l’équivalent d’une société de la Silicon Valley aujourd’hui » compare Galison. L’intérêt d’Albert pour la science et la technologie vint donc tout naturellement.
Parfois, les parents d’Albert amenaient leur grand garçon à des soirées mondaines. Ils n’avaient pas besoin de baby sitter : Albert s’asseyait sur le canapé, totalement absorbé par les problèmes de mathématiques dans lesquels il s’immergeait dès qu’il avait 5 minutes à lui. Papier et stylo étaient sa console de jeux à lui !
Il avait d’impressionnantes facultés de concentration. La soeur d’Albert Einstein, Maïa, l’évoquait en ces termes : « ... même lorsqu’il y avait beaucoup de bruit autour de lui, il pouvait s’allonger sur le canapé, prendre un stylo et un papier, mettre un encrier en équilibre précaire sur le dossier et s’absorber complètement dans un problème au point que le bruit de fond était plus une stimulation qu’une gêne pour lui. »
Einstein était certes intelligent, mais pas formidablement plus que ses pairs. « Je n’ai aucun talent particulier » se plaisait-il à répéter. « Je suis seulement passionnément curieux ». Puis il enfonçait le clou : « le contraste entre ce que les gens imaginent de mes capacités et la réalité est tout simplement grotesque ». Einstein portait ses découvertes au crédit de son imagination et d’un questionnement incessant plus qu’à son intelligence.
Plus tard, il fit porter tout son effort sur la recherche d’une théorie des champs unifiés qui aurait permis de réconcilier la gravité avec les autres forces de la nature. Il échoua. De fait, les facultés d’Einstein n’étaient pas sans limites. Son cerveau non plus. À la mort d’Einstein en 1955, le docteur Thomas Harvey le préleva, sans permission. Harvey espérait sans doute y découvrir quelque chose d’extraordinaire : il était de notoriété publique que la mère d’Einstein, Pauline, s’était inquiétée du fait que son fils, bébé, avait la tête fortement de travers (la grand-mère d’Einstein avait elle un autre motif d’inquiétude pour son petit-fils : « beaucoup trop gras ! »).
Mais en réalité, le cerveau d’Einstein n’avait rien d’extraordinaire : gris, plein de circonvolutions, et même un tantinet plus petit que la moyenne.
Les études détaillées du cerveau d’Einstein ne furent entreprises qu’assez récemment. En 1985 par exemple, le Professeur Marian Diamond, de Berkeley, y releva un nombre supérieur à la moyenne de cellules gliales (qui nourrissent les neurones) dans certaines aires des l’hémisphère gauche dont on pense qu’elles sont impliquées dans les processus de calcul mental. En 1999, la neurochirurgienne Sandra Witelson remarqua que le lobe pariétal inférieur d’Einstein, une zone impliquée dans le raisonnement logique, était 15% plus grand que la moyenne. De plus, elle observa que le pli Slyvien, un sillon qui s’étend normalement depuis le devant jusqu’à l’arrière du cerveau, s’arrêtait en chemin chez Einstein. Cette particularité permettait-elle une plus grande connectivité entre les différentes parties du cerveau d’Einstein ? En vérité, personne ne le sait.
Ne pas savoir. C’est une situation qui met bon nombre de chercheurs mal à l’aise. Pour Einstein, c’était un puissant stimulant :« La plus belle chose à laquelle nous puissions être confrontés, c’est le mystère » disait-il. « C’est l’émotion fondamentale qui veille aussi bien sur le berceau des sciences véritables que sur celui des arts ».
C’est l’émotion fondamentale qu’Einstein ressentait en permanence, qu’il ait été en route pour le travail, en train de bercer son bébé ou de discuter pendant le repas. Le meilleur remède à l’harassante routine du quotidien, c’est l’émerveillement.

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Quel homme que l'humanité a connu, c'est dommage que l'imagination a fait place au matérialiste. Moi, j'échangerai bien ma Mercedez pour vivre dans le passé imaginaire où tout était à bâtir, où qu'on pouvait rêver et se réveiller avec l'idée d'être le meilleur.

Autre temps, autre mœurs.

Publié : jeu. oct. 27, 2005 9:51 am
par Blanche Neige
«Moi, on m'acclame parce que tout le monde me comprend et vous on vous acclame parce que personne ne vous comprend!» (Charlie Chaplin à Albert Einstein alors que tous les deux, côte à côte, étaient acclamés par la foule. )

Me semble de mourir dans 40 ans avec le poster de Mailloux dans la chambre de ma ptite fille     , faut croire que les génies sont plutot incompris et méprisant pour le peuple ordinaire mais ils ont souvent tellement raison...