Système de santé au Québec
Publié : ven. mars 12, 2010 9:24 am
jeudi 11 mars 2010
Système de santé au Québec (1): De grâce, pas un nouveau sommet!
( Blogue de Joanne Marcotte, Réalisatrice du film Illusion tranquille )
J'entends de plus en plus de voix qui expriment le souhait qu'ait lieu au Québec un nouveau Sommet sur la santé. Or, la pire chose que le gouvernement pourrait faire serait d'organiser un sommet. L'autre pire chose serait de continuer à faire croître les dépenses publiques en santé au rythme actuel de 6%.
Cela ne veut pas dire qu'il faille diminuer les dépenses totales en santé. Cela veut simplement dire qu'il faut trouver d'autres sources de revenus, privées celles-là, pour absorber la croissance des coûts de santé qui inévitablement frappera le Québec comme l'ensemble des pays de l'OCDE, mais plus particulièrement le Québec à cause du taux de vieillissement accéléré de sa population.
Pourquoi pas un sommet?
Parce qu'après les rapports Rochon, Clair, Ménard et Castonguay (auquel j'ai participé), les problèmes sont connus. Archi-connus. Et que pour l'essentiel, une grande partie des problèmes relève 1) de cette guerre idéologique public-privé qui bloque toute innovation, et 2) des luttes corporatistes qui nuisent à une organisation efficace et optimale du travail.
Et ce n'est pas un sommet qui va régler ça. Au contraire! Sommes-nous à ce point naîfs pour ne pas y voir le risque, sinon la certitude, que soit "hijacké" ce sommet aux intentions louables, par les groupes d'intérêts, syndicaux et autres? Voulons-nous vraiment leur donner encore une fois une occasion de co-gouverner le Québec? Je dis non. Plutôt, je dis au gouvernement: écoutez le peuple. Il est ouvert aux solutions innovatrices, et lisez les sondages: le peuple comme dans d'autres domaines, est bien en avance sur ses élites.
Non. Les solutions ne viendront pas d'un sommet mais résident chez les professionnels eux-mêmes, sur le terrain, à la condition qu'ils aient les mains libres de toute contrainte technocratique, corporatiste et syndicale. Libérez ces gens et on verra bien ce dont ils sont capables. Autrement, de grâce, permettez que soit tentée une expérience d'hôpital privé (à but non lucratif, pour ne pas trop faire "freaker" les bien-pensants sociaux-démocrates)
Quelle expérience extraordinaire cela pourrait constituer! Un financement à l'activité où le patient est un revenu et non une dépense, des gestionnaires libérés des contraintes politiques imposées par le ministère mais responsables et imputables de la qualité des soins dispensés dans leur établissement, des médecins engagés envers leur institution, des professionnels libérés des contraintes des conventions collectives et ayant le loisir d'organiser les équipes de travail de la façon la plus optimale qui soit. Vous imaginez le défi? Et les leçons que nous pourrions en tirer?
À mon avis, et j'en suis certaine, cette concurrence est maintenant nécessaire et essentielle. Les preuves sont faites: le monopole en santé ne livre pas la marchandise et est perpétuellement en crise. Si ça marchait, on le saurait!
Et de la même façon que les écoles privées au Québec ont "botté" le derrière des écoles publiques, je crois que nous apprendrions beaucoup à faire un essai de ce genre dans le milieu de la santé. Le besoin d'un nouveau centre de services existe: à Laval comme en Montérégie. Aux élites médicales, pourquoi ne pas proposer un tel projet aux Québécois au lieu de proposer de taxer les bouteilles d'eau? Voilà ce qu'on attend de vous: d'être des éclaireurs, des réformateurs, des contestataires, oui, mais des défenseurs des patients avant toute autre chose.
Allez! Foncez! Après tout, on a construit les barrages de la Baie James! Pourquoi pas rêver? Quant aux partisans du statu quo, je leur demande: "De quoi avez-vous peur?
__________
Pour les intéressés, laissez-moi vous rappeler quelques notes que j'avais prises lors des consultations du Comité Castonguay. La plupart des commentaires qui suivent ne sont pas de moi. Ils proviennent de gens qui ont défilé devant les membres du comité, de gens oeuvrant dans le système de santé et de spécialistes: en économie de la santé, en organisation du travail, etc.
Attention aux oreilles sensibles: beaucoup de ces constats portant spécifiquement sur l'organisation du travail sont soit tabous, soit niés.
Les hôpitaux anglophones font mieux que les hôpitaux francophone
Les hôpitaux anglophones ont de fort taux de rétention de leur personnel que les hôpitaux francophones. Donc moins de roulement de personnel au niveau des infirmières et moins de roulement de personnel pour ce qui est des directeurs des soins infirmiers - Infirmière d'expérience
De plus en plus d'intervenants expriment à voix haute que la source de tous les problèmes se résume à la liberté et l'autonomie de pratique du corps médical
Les professionnels de la santé (particulièrement les infirmières), en adhérant aux principes de l’ancienneté, ont créé leur propre malheur en intéressant les plus jeunes à choisir les agences privées, faute de pouvoir obtenir des horaires intéressants
Les conventions collectives rigidifient l'organisation du travail - Représentante du corps infirmier
Qu’il y a une guerre idéologique dans le système de santé qui génère hypocrisie et dont le résultat est la profusion de voies de contournement du système "officiellement" public
Que malgré un discours voulant privilégier la 1ère ligne, on n’a pas mis en place les conditions pour assurer son succès : financement, présence de jeunes médecins, infirmières. Pourquoi? Parce que cette première ligne est "privée" et que les idéologues de gauche considèrent qu'il vaut mieux financer une offre publique de 1ère ligne: les CLSC
Ce qui fait mal à Montréal, ce sont les CLSC qui embauche du personnel de 8 à 4
Les spécialistes font trop de 1ère ligne, les omnipraticiens réfèrent trop aux spécialistes, mais ne délèguent pas assez aux infirmières, les infirmières veulent hériter des tâches du médecin mais ne veulent pas déléguer aux infirmières-auxiliaires et préposés. Les préposés sont à bout de souffle. Bref, il y a un travail immense à faire pour faire faire « le bon service » par « la bonne personne ».
La pénurie des médecins pourrait être compensée par l'ajout d'efficience - Représentant du corps médical
Les résidents font leur stage ailleurs parce que le plan d'effectifs est trop contraignant
50% des visites à l'urgence pourraient se faire ailleurs - Ancien directeur d'agence
Ce n’est pas une question de structures, c’est une question de culture. Dans l’administration publique, l’harmonie est la valeur dominante et non l’efficience. - Représentant de médecins
Système de santé au Québec (1): De grâce, pas un nouveau sommet!
( Blogue de Joanne Marcotte, Réalisatrice du film Illusion tranquille )
J'entends de plus en plus de voix qui expriment le souhait qu'ait lieu au Québec un nouveau Sommet sur la santé. Or, la pire chose que le gouvernement pourrait faire serait d'organiser un sommet. L'autre pire chose serait de continuer à faire croître les dépenses publiques en santé au rythme actuel de 6%.
Cela ne veut pas dire qu'il faille diminuer les dépenses totales en santé. Cela veut simplement dire qu'il faut trouver d'autres sources de revenus, privées celles-là, pour absorber la croissance des coûts de santé qui inévitablement frappera le Québec comme l'ensemble des pays de l'OCDE, mais plus particulièrement le Québec à cause du taux de vieillissement accéléré de sa population.
Pourquoi pas un sommet?
Parce qu'après les rapports Rochon, Clair, Ménard et Castonguay (auquel j'ai participé), les problèmes sont connus. Archi-connus. Et que pour l'essentiel, une grande partie des problèmes relève 1) de cette guerre idéologique public-privé qui bloque toute innovation, et 2) des luttes corporatistes qui nuisent à une organisation efficace et optimale du travail.
Et ce n'est pas un sommet qui va régler ça. Au contraire! Sommes-nous à ce point naîfs pour ne pas y voir le risque, sinon la certitude, que soit "hijacké" ce sommet aux intentions louables, par les groupes d'intérêts, syndicaux et autres? Voulons-nous vraiment leur donner encore une fois une occasion de co-gouverner le Québec? Je dis non. Plutôt, je dis au gouvernement: écoutez le peuple. Il est ouvert aux solutions innovatrices, et lisez les sondages: le peuple comme dans d'autres domaines, est bien en avance sur ses élites.
Non. Les solutions ne viendront pas d'un sommet mais résident chez les professionnels eux-mêmes, sur le terrain, à la condition qu'ils aient les mains libres de toute contrainte technocratique, corporatiste et syndicale. Libérez ces gens et on verra bien ce dont ils sont capables. Autrement, de grâce, permettez que soit tentée une expérience d'hôpital privé (à but non lucratif, pour ne pas trop faire "freaker" les bien-pensants sociaux-démocrates)
Quelle expérience extraordinaire cela pourrait constituer! Un financement à l'activité où le patient est un revenu et non une dépense, des gestionnaires libérés des contraintes politiques imposées par le ministère mais responsables et imputables de la qualité des soins dispensés dans leur établissement, des médecins engagés envers leur institution, des professionnels libérés des contraintes des conventions collectives et ayant le loisir d'organiser les équipes de travail de la façon la plus optimale qui soit. Vous imaginez le défi? Et les leçons que nous pourrions en tirer?
À mon avis, et j'en suis certaine, cette concurrence est maintenant nécessaire et essentielle. Les preuves sont faites: le monopole en santé ne livre pas la marchandise et est perpétuellement en crise. Si ça marchait, on le saurait!
Et de la même façon que les écoles privées au Québec ont "botté" le derrière des écoles publiques, je crois que nous apprendrions beaucoup à faire un essai de ce genre dans le milieu de la santé. Le besoin d'un nouveau centre de services existe: à Laval comme en Montérégie. Aux élites médicales, pourquoi ne pas proposer un tel projet aux Québécois au lieu de proposer de taxer les bouteilles d'eau? Voilà ce qu'on attend de vous: d'être des éclaireurs, des réformateurs, des contestataires, oui, mais des défenseurs des patients avant toute autre chose.
Allez! Foncez! Après tout, on a construit les barrages de la Baie James! Pourquoi pas rêver? Quant aux partisans du statu quo, je leur demande: "De quoi avez-vous peur?
__________
Pour les intéressés, laissez-moi vous rappeler quelques notes que j'avais prises lors des consultations du Comité Castonguay. La plupart des commentaires qui suivent ne sont pas de moi. Ils proviennent de gens qui ont défilé devant les membres du comité, de gens oeuvrant dans le système de santé et de spécialistes: en économie de la santé, en organisation du travail, etc.
Attention aux oreilles sensibles: beaucoup de ces constats portant spécifiquement sur l'organisation du travail sont soit tabous, soit niés.
Les hôpitaux anglophones font mieux que les hôpitaux francophone
Les hôpitaux anglophones ont de fort taux de rétention de leur personnel que les hôpitaux francophones. Donc moins de roulement de personnel au niveau des infirmières et moins de roulement de personnel pour ce qui est des directeurs des soins infirmiers - Infirmière d'expérience
De plus en plus d'intervenants expriment à voix haute que la source de tous les problèmes se résume à la liberté et l'autonomie de pratique du corps médical
Les professionnels de la santé (particulièrement les infirmières), en adhérant aux principes de l’ancienneté, ont créé leur propre malheur en intéressant les plus jeunes à choisir les agences privées, faute de pouvoir obtenir des horaires intéressants
Les conventions collectives rigidifient l'organisation du travail - Représentante du corps infirmier
Qu’il y a une guerre idéologique dans le système de santé qui génère hypocrisie et dont le résultat est la profusion de voies de contournement du système "officiellement" public
Que malgré un discours voulant privilégier la 1ère ligne, on n’a pas mis en place les conditions pour assurer son succès : financement, présence de jeunes médecins, infirmières. Pourquoi? Parce que cette première ligne est "privée" et que les idéologues de gauche considèrent qu'il vaut mieux financer une offre publique de 1ère ligne: les CLSC
Ce qui fait mal à Montréal, ce sont les CLSC qui embauche du personnel de 8 à 4
Les spécialistes font trop de 1ère ligne, les omnipraticiens réfèrent trop aux spécialistes, mais ne délèguent pas assez aux infirmières, les infirmières veulent hériter des tâches du médecin mais ne veulent pas déléguer aux infirmières-auxiliaires et préposés. Les préposés sont à bout de souffle. Bref, il y a un travail immense à faire pour faire faire « le bon service » par « la bonne personne ».
La pénurie des médecins pourrait être compensée par l'ajout d'efficience - Représentant du corps médical
Les résidents font leur stage ailleurs parce que le plan d'effectifs est trop contraignant
50% des visites à l'urgence pourraient se faire ailleurs - Ancien directeur d'agence
Ce n’est pas une question de structures, c’est une question de culture. Dans l’administration publique, l’harmonie est la valeur dominante et non l’efficience. - Représentant de médecins