
(Trois-Rivières) Alain Gaudet se porte à la défense de Mike Ward. Le Trifluvien cloué à son fauteuil roulant estime qu'il vaut mieux rire de la blague de l'humoriste à l'endroit de Jérémy Gabriel, connu il y a quelques années sous le nom de «petit Jérémy», que de la dénoncer.
Alain Gaudet connaît bien Mike Ward et sait à quel point il a à coeur le bien-être des personnes handicapées. En 2013, l'humoriste avait voulu l'aider à améliorer son quotidien en présentant à Trois-Rivières en compagnie d'autres humoristes un spectacle-bénéfice. Ceci lui a permis de demeurer dans son appartement supervisé plutôt que de déménager dans un CHSLD.
«C'est le personnage de Mike qui a fait un sketch qui a dérangé, après coup par contre, ça fait quand même un petit bout que le numéro roule», lance d'emblée Alain Gaudet en entrevue.
«C'est sûr que ça doit être difficile [pour Jérémy Gabriel], mais les personnalités publiques sont toutes à la merci des commentaires», ajoute-t-il en avouant ne jamais avoir été blessé par une blague de Mike Ward. «Ça fait partie de la game et il faut vivre avec ça. [...] On s'écoeure lui et moi, mais il n'y a jamais aucune méchanceté là-dedans.»
Le Trifluvien vivant avec l'amyotrophie spinale de type 3, une forme de dystrophie musculaire, ne croit pas que Mike Ward a une aversion envers les personnes handicapées, bien au contraire. Il voit en lui un humoriste qui désire inclure ces personnes, une inclusion qui se traduit par des blagues dans ses numéros.
«Mike, quand il parle des personnes handicapées, je ne vois pas quelqu'un qui les déteste. Au contraire, je vois une personne qui veut l'intégration et qu'il met tout le monde sur un pied d'égalité. Ça inclut des côtés plus négatifs, mais c'est la normalité d'une vie publique», note M. Gaudet en précisant que Mike Ward oeuvre notamment auprès de la fondation le Pont vers l'autonomie, un organisme qui aide les personnes handicapées. «Mike m'a aidé pour l'acquisition de plusieurs équipements pour faciliter ma vie. Je ne crois pas qu'il a de la haine envers personne, au contraire. C'est un gars timide et réservé. Je suis convaincu qu'il ne feel pas bien ces temps-ci.»
Est-ce que Mike Ward est allé trop loin avec sa blague sur le «petit Jérémy»? Alain Gaudet ne croit pas. Il indique que l'humoriste défend Jérémy Gabriel dans son numéro, avant de lancer des blagues pour le moins caustiques. «Lorsque j'ai vu le spectacle, j'ai trouvé ça drôle. Lorsqu'il construit son numéro, il défend le petit Jérémy en disant que tout le monde riait de lui, mais Mike leur répondait qu'il réalisait un rêve. C'est un numéro», affirme Alain Gaudet. «Je comprends Jérémy d'être blessé, mais en même temps, ses parents lorsqu'ils l'ont mis sur la place publique devaient peut-être s'attendre à une réaction.»
Lorsqu'on demande à Alain Gaudet si ce n'est pas trop facile de rire des personnes handicapées, il répond qu'un humoriste, comme un caricaturiste, va amplifier un trait marquant chez une personnalité.
«C'est facile de rire de n'importe qui. On trouve le point faible d'une personnalité publique et on l'exploite. Dans les caricatures du Nouvelliste, on voit toujours le grand front de M. Lévesque [maire de Trois-Rivières], c'est de la caricature», explique M. Gaudet qui souligne que s'il est caricaturé un jour, ce sera «avec un gros Tonka» sous lui. «Il faut en rire, la vie est courte. Il faut en rire absolument.»
Alain Gaudet espère que le débat sur la liberté d'expression entourant l'affaire Mike Ward engendre une discussion sur les handicapes et les besoins des personnes handicapées à l'heure, dit-il, où les coupes en santé influencent leur quotidien.
«Est-ce que ça peut ramener une certaine noblesse aux personnes handicapées? On n'en parle pas de ces personnes. Il y a eu une vague de suicides en 2014 [...]. La détresse des personnes handicapées, c'est important d'en parler. Mais on n'a jamais l'opportunité d'avoir le micro pour le faire», affirme Alain Gaudet.