La maison bleue
Publié : ven. mai 31, 2019 1:40 pm
La poutine de chez Austin
Richard Therrien
CHRONIQUE / Nous sommes au bureau ovale du président de la République du Québec. Élu en 2016, Jacques Hamelin réprimande sa fille Gabrielle, qui a osé présenter une dissertation au cégep sur les bienfaits du fédéralisme, saluée par son professeur, reprise depuis partout dans les médias, et tout ça, avec l’assentiment de la première dame. Un scandale de plus à étouffer pour le président Hamelin, qui en a déjà plein les bras avec les propositions farfelues de son homologue américain.
«Dans n’importe quel show politique, aussi sérieux soit-il, c’est une accumulation de problèmes un par-dessus l’autre», me dit l’auteur et réalisateur Ricardo Trogi, sur le plateau de tournage de La maison bleue, dans le sud-ouest de Montréal. Annoncée récemment, cette comédie destinée à l’Extra d’ICI Tou.tv imaginera ce qu’aurait été le Québec si le Oui l’avait emporté en 1995. À l’extérieur du bureau ovale, réplique réduite de celui de la Maison-Blanche, sont affichés des portraits des anciens chefs souverainistes (Landry, Bouchard, Lévesque, etc.) et de... Mario Tremblay. On ne sait toujours pas qui apparaîtra sur les dollars québécois. Au fait, Jacques Hamelin ne perd pas l’habitude de manger sa poutine, non pas chez Ashton, mais bien chez Austin.
La maison bleue pose essentiellement la question suivante : «A-t-on les moyens de nos ambitions?» Parce que, même 25 ans après son indépendance, le Québec ne parvient pas à se sortir du débat identitaire. Ricardo Trogi, en nomination au Gala Québec Cinéma dimanche soir prochain pour son film 1991, s’étonne que personne n’ait eu l’idée de faire une série sur ce sujet. Y’a-t-il un risque qu’on accuse la série de mépris envers le projet souverainiste? «C’est de la comédie, je ne peux pas y aller à moitié. On a fait attention pour que le Québec et le Canada soient couillons ou stupides égaux dans leurs façons de gérer leur propre pays. Il y a un souci d’équilibre, aussi en terme de diversité», affirme Trogi, qui s’attend à recevoir plus de réactions que pour ses œuvres précédentes. Après tout, la politique est une religion. «Mais je ne virerai pas fou non plus avec ça.»
Guy Nadon, qui incarne ce président rempli de bonne volonté, a le privilège et le luxe de cumuler en parallèle les rôles dramatiques et comiques depuis plusieurs années. «La vie d’un acteur est fantasmique. Je passe ma vie à me réaliser à travers quelqu’un d’autre que moi-même», confie le comédien avec un brin d’excitation. «Même O’ pouvait me permettre de juxtaposer le ridicule au drame des êtres humains. J’ai souvent vu ça dans ma propre vie, que ce soit dans les salons mortuaires ou les mariages.» Et si on avait dit Oui en 1995? «On aurait plus d’ambassadeurs, plus de compétences qui nous seraient utiles. C’est pour ça que les gens font des pays, pour devenir plus compétents», croit Guy Nadon, qui portait une écharpe au bras sur le plateau. La cause : une bataille du président avec son voisin fédéraliste, venu s’installer juste à côté juste pour lui rendre la vie impossible.
Aucun politicien ne retrouvera sa parodie dans La maison bleue, pas plus François Legault que Manon Massé. Le président américain ne s’appelle ni Flump, ni Crump, il s’appelle plutôt Lester Richards et a les cheveux blancs, pas oranges. On imagine tout de même qu’il est républicain. Le rôle a été confié à Bruce Gregory Dinsmore — vous vous souvenez du chum anglophone de Lola dans Chambres en ville? Ricardo Trogi, qui coécrit la série avec Daniel Savoie, avec la collaboration de Louis Morissette, miserait sur une deuxième saison pour faire apparaître un président français, et pour s’intéresser davantage aux opposants du parti de Jacques Hamelin, Nation Québec. Commençons par voir la première saison.
Ancienne duchesse du Carnaval, la première dame, Mireille Turcotte, arbore une robe rose en ce jour de tournage, plus inspirée de Melania Trump que de Jackie Kennedy. «C’est sûr que ça va faire parler les gens, parce que c’est un sujet chaud», croit son interprète, Anne-Marie Cadieux, ravie de camper cette femme qui ne parle pas la langue de Shakespeare, mais apprécie beaucoup, beaucoup son prof d’anglais. La comédienne ne croit pas que la série accentuera notre cynisme envers les politiciens et qu’il faut tout de même «la prendre avec un grain de sel».
Une partie de l’équipe de KOTV se déplaçait ce week-end trois jours de tournage à Québec, notamment pour une scène impliquant un sous-marin des Forces armées québécoises, menées par le général Charrette (Roger Léger). Bien que la Maison bleue soit située à Sillery dans l’histoire, on tourne essentiellement dans la métropole. Croisés sur le plateau, Geneviève Schmidt incarne la directrice des communications Karine Lavoie, Claude Despins, le vice-président Boudreau, et Richardson Zéphir, le garde du corps du président, Stéphane Boisclair. Il reste 15 jours de tournage à cette comédie, dont les 10 épisodes de 30 minutes seront mis en ligne l’hiver prochain.
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Richard Therrien
CHRONIQUE / Nous sommes au bureau ovale du président de la République du Québec. Élu en 2016, Jacques Hamelin réprimande sa fille Gabrielle, qui a osé présenter une dissertation au cégep sur les bienfaits du fédéralisme, saluée par son professeur, reprise depuis partout dans les médias, et tout ça, avec l’assentiment de la première dame. Un scandale de plus à étouffer pour le président Hamelin, qui en a déjà plein les bras avec les propositions farfelues de son homologue américain.
«Dans n’importe quel show politique, aussi sérieux soit-il, c’est une accumulation de problèmes un par-dessus l’autre», me dit l’auteur et réalisateur Ricardo Trogi, sur le plateau de tournage de La maison bleue, dans le sud-ouest de Montréal. Annoncée récemment, cette comédie destinée à l’Extra d’ICI Tou.tv imaginera ce qu’aurait été le Québec si le Oui l’avait emporté en 1995. À l’extérieur du bureau ovale, réplique réduite de celui de la Maison-Blanche, sont affichés des portraits des anciens chefs souverainistes (Landry, Bouchard, Lévesque, etc.) et de... Mario Tremblay. On ne sait toujours pas qui apparaîtra sur les dollars québécois. Au fait, Jacques Hamelin ne perd pas l’habitude de manger sa poutine, non pas chez Ashton, mais bien chez Austin.
La maison bleue pose essentiellement la question suivante : «A-t-on les moyens de nos ambitions?» Parce que, même 25 ans après son indépendance, le Québec ne parvient pas à se sortir du débat identitaire. Ricardo Trogi, en nomination au Gala Québec Cinéma dimanche soir prochain pour son film 1991, s’étonne que personne n’ait eu l’idée de faire une série sur ce sujet. Y’a-t-il un risque qu’on accuse la série de mépris envers le projet souverainiste? «C’est de la comédie, je ne peux pas y aller à moitié. On a fait attention pour que le Québec et le Canada soient couillons ou stupides égaux dans leurs façons de gérer leur propre pays. Il y a un souci d’équilibre, aussi en terme de diversité», affirme Trogi, qui s’attend à recevoir plus de réactions que pour ses œuvres précédentes. Après tout, la politique est une religion. «Mais je ne virerai pas fou non plus avec ça.»
Guy Nadon, qui incarne ce président rempli de bonne volonté, a le privilège et le luxe de cumuler en parallèle les rôles dramatiques et comiques depuis plusieurs années. «La vie d’un acteur est fantasmique. Je passe ma vie à me réaliser à travers quelqu’un d’autre que moi-même», confie le comédien avec un brin d’excitation. «Même O’ pouvait me permettre de juxtaposer le ridicule au drame des êtres humains. J’ai souvent vu ça dans ma propre vie, que ce soit dans les salons mortuaires ou les mariages.» Et si on avait dit Oui en 1995? «On aurait plus d’ambassadeurs, plus de compétences qui nous seraient utiles. C’est pour ça que les gens font des pays, pour devenir plus compétents», croit Guy Nadon, qui portait une écharpe au bras sur le plateau. La cause : une bataille du président avec son voisin fédéraliste, venu s’installer juste à côté juste pour lui rendre la vie impossible.
Aucun politicien ne retrouvera sa parodie dans La maison bleue, pas plus François Legault que Manon Massé. Le président américain ne s’appelle ni Flump, ni Crump, il s’appelle plutôt Lester Richards et a les cheveux blancs, pas oranges. On imagine tout de même qu’il est républicain. Le rôle a été confié à Bruce Gregory Dinsmore — vous vous souvenez du chum anglophone de Lola dans Chambres en ville? Ricardo Trogi, qui coécrit la série avec Daniel Savoie, avec la collaboration de Louis Morissette, miserait sur une deuxième saison pour faire apparaître un président français, et pour s’intéresser davantage aux opposants du parti de Jacques Hamelin, Nation Québec. Commençons par voir la première saison.
Ancienne duchesse du Carnaval, la première dame, Mireille Turcotte, arbore une robe rose en ce jour de tournage, plus inspirée de Melania Trump que de Jackie Kennedy. «C’est sûr que ça va faire parler les gens, parce que c’est un sujet chaud», croit son interprète, Anne-Marie Cadieux, ravie de camper cette femme qui ne parle pas la langue de Shakespeare, mais apprécie beaucoup, beaucoup son prof d’anglais. La comédienne ne croit pas que la série accentuera notre cynisme envers les politiciens et qu’il faut tout de même «la prendre avec un grain de sel».
Une partie de l’équipe de KOTV se déplaçait ce week-end trois jours de tournage à Québec, notamment pour une scène impliquant un sous-marin des Forces armées québécoises, menées par le général Charrette (Roger Léger). Bien que la Maison bleue soit située à Sillery dans l’histoire, on tourne essentiellement dans la métropole. Croisés sur le plateau, Geneviève Schmidt incarne la directrice des communications Karine Lavoie, Claude Despins, le vice-président Boudreau, et Richardson Zéphir, le garde du corps du président, Stéphane Boisclair. Il reste 15 jours de tournage à cette comédie, dont les 10 épisodes de 30 minutes seront mis en ligne l’hiver prochain.
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